(vivian) build it better the second time around.

Y’a trois têtes blondes sur tous les portraits. Et les portraits, ils sont gros. Ils sont massifs. Ils couvrent quelques uns des murs de cette maison trop grande dans laquelle tu as grandi avec deux autres têtes blondes. Celles qui sont à côté de toi sur les portraits. Le problème, c’est que dans ta famille, on oublie souvent que vous êtes trois. Trop souvent. Toi, t’es toujours dans le milieu, même quand vous êtes seulement deux, tu te sens toujours dans le milieu. Sur les photos du moins, t’es la tête blonde dans le milieu qui sourit trop. Si le photographe devait rappeler à tes sœurs de sourire un peu, tu étais celle que l’on reprenait pour avoir l’air plus sérieuse. Ce n’était jamais un grand succès toutefois. Tes sœurs grimaçaient plus qu’elles ne souriaient, et toi, tu avais l’air trop excitée pour le moment. Chaque fois que tu rends visite à ton père, tu prends de longues minutes pour les admirer, ses gigantesques portraits. Si toute ta vie pouvait être figée en un seul moment, elle ressemblerait sûrement à l’un de ces portraits. Tes sœurs qui grimacent autour de toi, proches sans vraiment l’être, et toi dans le milieu, gamine et un brin idiote – du moins en apparence – qui prétend ne pas savoir quoi faire de ce trou immense dans ta famille. Le trou qu’à laisser derrière ce qui aurait dû être la quatrième tête blonde sur les portraits. Cette tête blonde qui est disparue à la naissance de la dernière tête blonde. Comme un sacrifice, un échange qui n’aurait jamais dû avoir lieu. Du moins, t’as l’impression que c’est ainsi que ta sœur et ton père le voit. Toi, tu te dis que c’est seulement un twist cruel du destin. Qu’il n’y a pas de faute, qu’il n’y a pas de blâme. Tu te dis que de chercher un coupable pour la mort de ta mère, c’est un jeu inutile et démoralisant. Que c’est ce jeu qui a détruit la famille que vous auriez pu être, que vous auriez dû être.

Les trois têtes blondes. Si différentes, et pourtant si semblables. Il suffit de regarder de près..

MARGARET
en construction.

RAIN
en construction.

VIVIAN
Tu aimes croire que tu retiens d’elle, que tu retiens de ta mère. Ton père n’en parle pas beaucoup et les souvenirs de la gamine de deux ans ne sont pas très fiables alors tu n’as que des photos et les quelques bribes que ta sœur a bien voulu partager avec toi. Rien de bien concret en soi. Alors tu t’es inventée une version de ta mère, une version qui te ressemble. Passionnée et intrépide, douce et artistique. Tu t’imagines partager tes histoires avec elle, tu l’imagines te donner des conseils, approuver tes idées et t’encourager dans cette direction, chose que ton père n’a jamais fait parce qu’il n’a jamais compris. Gamine, ta mère elle était encore vivante dans tous tes mondes imaginaires. Elle revenait de toutes les façons les plus farfelues, mais elle revenait. Comme si les années n’avaient pas filées, comme si elle n’était jamais partie. (en construction)