last words of a shooting star

 « Tu n’as pas à me sermonner, Aonghas. » Le regard du vieil homme pétille. « Voyons, je n’ai pas encore passé la porte. » C’est vrai : il se tient poliment sur le seuil, son impressionnante carrure tenant de justesse dans le cadre. Il sourit. Il est si doux, derrière toute cette barbe et toute sa force. Il sait qu’Ariel ne peut pas lui résister longtemps. D’une main, elle envoie la cafetière se nettoyer, se remplir, se poser sur le feu, qu’elle allume de l’autre. « Tu t’es encore améliorée », fait remarquer le vieil homme en s’installant à la table de la cuisine (la chaise craque légèrement lorsqu’il s’y assied). Ariel ne répond pas, tout juste un rire étouffé, un rictus. Cause toujours, vieillard. Non, il essaie seulement d’être gentil. Il n’a même pas tort. Mais à quoi bon ? « Je suis trop vieille pour Poudlard, on le sait tous les deux. » Comme si c’était le seul problème. Je suis trop vieille tout court. Elle s’assied face à lui. Ils ne disent rien. Pour une fois, Aonghas ne fait même pas la conversation. Il la regarde dans les yeux. Elle ne dit rien. La cafetière siffle – Ariel la fait venir avec deux tasses, les sert. « Tu sais, j’ai été jeune moi aussi. » Ariel rit. Le sermon commence-t-il enfin ? « Ne me prends pas pour une idiote. Tu étais là avant moi, Aonghas. Tu seras là après moi. » Il baisse les yeux. Touché. « Et pourtant tu es jeune. C’est injuste, dit-il avant d’avaler une gorgée de café brûlant. Mais ce n’est pas encore arrivé. Ne lève pas les yeux au ciel ! Tu es encore là. Ariel ? Tu es là. » Il lui prend la main. Elle ne la retire pas. « Tu n’es pas encore… Tu as encore le temps. Tu sais bien. Peu de temps, c’est vrai. Mais tu l’as. » Elle la retire, maintenant. « Je ne suis pas en deuil. Tu n’as pas besoin de me consoler. J’ai pleuré » elle s’arrête. Elle ne veut pas dire les noms. Elle voit le visage d’une femme qu’elle a aimée. Elle voit courir dans les montagnes les enfants qu’elle ne pourra jamais avoir. Elle voit un faucon en piquée, déchirant de son bec puissant une créature chétive. Elle voit la silhouette de sa mère s’éloigner, en souriant. Elle l’entend dire je t’aime. Ses yeux seraient mouillés, peut-être, mais « j’ai assez pleuré. Je ne vais pas pleurer pour moi-même. » Le café râpe sa langue. Il est trop chaud. « Ce n’est pas ce que je te demande, au contraire. » Elle se lève. Elle n’a plus envie d’en parler. « Je dois aller voir les dragons. » Elle sait qu’il la suivra. Pendant des heures, ils travaillent, ensemble, dans le vent froid des highlands. Aonghas forge une griffe de la taille de son poing. Ariel ramasse les herbes, le charbon, l’eau de la rivière ; pille le tout. Elle plonge ses mains dans la pâte bleu nuit ; quelques granules cristallins attrapent la lumière du soleil déclinant et l’éblouissent. Puis elle crie et chante à la fois, de tout l'air de ses poumons et la force de sa poitrine, elle chante et crie son appel aux nuages. Un coup de tonnerre lui répond, fidèle. Une tache dans le ciel apparaît et s'approche, gigantesque. Le dragon touche terre à quelques dizaines de mètres et marche, boîte, s’arrête, reprend. Ils se rejoignent à mi-chemin – quand elle le touche, la pâte bleue disparaît sous ses écailles. Les deux fours de ses naseaux se gonflent et soufflent un soupir de soulagement. Ariel l’oint et le caresse vigoureusement jusqu’à la nuit. Quand le dragon reprend son vol, elle revient vers Aonghas, le conseille sur son œuvre. Elle se tait, contemple les montagnes tout autour d'elle. Cela pourrait être sa vie. L’air remplit ses poumons. Seul le son du vent et des sabots de rennes, très loin, parviennent à ses oreilles. Si pur. Si beau. Cela pourrait être toute sa vie, tout ce qui lui en reste, même. C’est seulement après le dîner – qu’ils partagent, exceptionnellement – qu’Aonghas parle à nouveau :
« Pars.
— Pour aller où ?
— Au Sud ? Londres ? Tu sais où. Au moins, fais tes adieux.
— Et au plus ?
— Vis.
— T’es con.
— Je peux m’en sortir, ici, tu sais. Pas éternellement mais avant que…
— Oui. Aonghas ?
— Dis-moi.
— Y aura-t-il quelqu’un, après moi ? Pour veiller sur les dragons ? Pour veiller sur Gaick, sur les Cairngorms, sur tout le monde. Qui sera là ? »
Aonghas n’a pas la réponse. Ou bien préfère-t-il ne pas la donner.
« Je n’ai pas fait de gâteau.
— Moi non plus. »
Ils rient parce qu’ils sont tristes.
« Je partirai, alors.
— Dieu merci ! Je vais enfin avoir la paix. »
Ils s’arrêtent de rire. Ses yeux pourraient être mouillés, mais…
« Joyeux anniversaire, Ariel. »

Dans un an, elle aura trente-quatre ans. Dans un an, elle aura l’âge que sa mère avait quand elle a disparu. De mère en fille, les maledictus sont vouées à se transformer en bête, définitivement. Leur conscience de sorcière, leurs souvenirs, leurs rêves, rien ne survit à l'animal, rien ne survit au changement. Dans un an, selon toute évidence, Ariel Faulkner disparaîtra.

pseudo/prénom › bas-bleu / luna fuseau horaire › français! comment t'es arrivé ici ? › un autre tissu bleu me l’a gentiment conseillé ton personnage ? › inventé une anecdote à ton sujet › j’adore les plages et les berges de rivières, je pourrai pas vivre quelque part où il n’y en a pas ! ah et je suis encore un peu sceptique sur mon avatar (j’ai aussi hésité avec tatiana maslany par exemple) donc si vous avez des suggestions n’hésitez pas !


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<bottin>ruth negga,</bottin> <bott>@"ariel faulkner"</bott>

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() résident des usa (x) résident de l'angleterre () sang-pur

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› ariel faulkner