KISS KISS BANG BANG - Monroe

« Je suis à la recherche d’une fille de notre nation. » Du bout de l’ongle, il était trop occupé à gratter la crasse de la table pour lever les yeux. L’homme laissa un silence, attendant une quelconque réaction, avant de continuer. « Son nom ne vous dit peut-être rien, mais elle est l’héritière des Calderon-Boot, l’une des familles les plus influentes d’amérique. » D’un mouvement de baguette, on leur servit deux whisky pur feu dans lequel ils plongèrent leurs regards. « Peut-être est-elle connue ici sous le nom de Rookwood- » « Non. » Raclement de gorge. « Excusez-moi ? » L’homme pris une gorgée de whisky avant de finalement planter son regard dans celui de l’auror du MACUSA. « Je ne prendrai pas ce contrat. Vos familles influentes, j’ai assez donné. Fitzgerald, ça vous dit quelque chose ? » A voir sa mâchoire se raidir, ça n’était que trop le cas.

On lui avait ordonné de rentrer. D’oublier, l’oublier elle, et oublier la proposition du Ministère. Daisy était introuvable, probablement morte, et accepter la proposition d’un certain Maugrey pour la retrouver était impensable. Aucune implication entre les Aurors du Congrès et du Ministère n’était envisageable lui avait-on dit. Encore moins une infiltration active au sein des Mangemorts. Ridicule lui avait dit son supérieur. Ridicule avait-elle répété. Qui mieux qu’une métamorphomage pouvait mener ce genre de mission ? Personne. Encore moins l’héritière d’une prestigieuse famille. Justice, t’en a que le nom. Justice, rentre à la maison.

Des clameurs résonnèrent dans le fond de l’auberge tandis que l’auror choisissait ses mots avec précaution. « Qui vous a donné un contrat pour retrouver Daisy ? » « Quelle importance. » Et il souffla du nez, un coin de ses lèvres déformé en un sourire figé. « Si vous avez une quelconque information sur elle, cela pourrait me mener, nous mener à Calderon-Boot. Et vous serez récompensé. » Une bourse remplie fut posée sur la table. Voilà à quoi se résumait l’importance d’une vie. Une centaine de gallions, dans la pire auberge du fin fond du pays de Galles.

Il lui disait d’accepter la marque. Il lui disait qu’il l’aimait. Il lui promettait qu’ils se marierait une fois que tout ça sera fini, et qu’ils pourront emménager chez la Smith qui de toute manière sera crevée. Sang-de-bourbe et son mari moldu, pendu, ouais, ils s’embrasseront en dessous de ses pieds. Entre deux envolées romantiques de ce style, il lui disait aussi leurs prochaines missions. Il tuait avec elle. Traquait avec elle. Et lorsque les cheveux de sa belle changeaient du roux à l’auburn aux racines, il s’étonnait à chaque fois qu’elle ne puisse pas être une vraie rouquine. Il aimait les rouquines. Peut-être l’aimait-il vraiment, elle aussi. Elle et ce visage qui n’était pas le sien, ce nom qui ne lui appartenait pas, pas plus que ce corps, que ces idéaux. Elle, elle se disait que les mains qu’elle se salissait n’étaient pas réellement les siennes, et lorsqu’elle faisait ses rapports aux Ministère, elle se disait encore qu’elle faisait la bonne chose. Tant qu’elle n’a pas retrouvé Daisy, cette guerre était la sienne, et elle pensait qu’à aider avec autant de zèle le Ministère, peut-être qu’un jour, le Ministère allait l’aider. C’était le deal. C’était pour ça qu’elle était restée.
Qu’elle s’était fiancée.

« Votre gamine est morte. Un de vos collègue a été envoyé pour la rapatrier saine et sauve, je suppose qu’il a échoué en beauté. » Il pouvait entendre les dents de l’auror grincer. « Et si je me trompe pas, c’est Calderon qui s’est foiré. » Le whisky glissa d’une traite dans le fond de sa gorge, et il reposa le verre vide avec force. « Vous ne vous trompez pas. » Et le regard du chasseur de prime se terni un peu plus tandis que son sourire timide s’élargit sous sa barbe fournie. Il commanda deux nouveaux whiskys, mais l’américain refusa. « A croire que vous en savez plus que moi. »

Dans ses mains tremblantes, elle relisait la lettre encore et encore. La guerre était finie, sa mission aussi. Tout ce qu’elle avait fait était consigné là, à l’encre, dans une écriture trop raffinée pour ce qu’elle décrivait. Echanges d’informations confidentielles auprès d’un autre état que le MACUSA. Désertion. Membre d’une organisation terroriste organisée. Haute trahison envers le Congrès et ses Institutions. Et puis, à la fin, la description de la protection auquel elle avait gracieusement le droit, de sa réhabilitation, de ce travail caché à Poudlard censé assurer sa sécurité. Des remerciements de la part de M. Scrimgeour pour ses années de services officieuses, pour les informations collectées – et puis le rappel qu’elle restait toutefois à la disposition du Ministère. Synonyme de contrepartie.

« Tout ce que je sais, c’est que des Boot, on en a ici en Angleterre. » Ils n’avaient pas envoyé un bleu face à elle. « Lointains cousins de votre demoiselle en détresse. Leur histoire ressemble à la sienne, en somme : piégé en Angleterre pour une simple mission, à jamais partis de la mère patrie. » Ils avaient envoyé l’ancien chef du Bureau, son ancien chef à elle. « Dommage pour les fondateurs d’Ilvermorny hein ? J’veux dire, finir auror à gage, anonyme, oublié.. » Ou plutôt, il était venu de son propre chef, et probablement sans aucune autorisation du Congrès. « L’histoire se répète. Vous savez, j’pense qu’il faudrait en tirer une sorte de conclusion poétique, et oublier tout ça. » Sa main était sur sa baguette, et il n’essayait même pas de le cacher – mais elle savait très bien que jamais il n’oserait la tuer. « Rentrez chez vous. » Le regard brillant de l’homme en attestait. « La justice n’en a que le nom. »