No forts in the bone arena of your skull for things you love.

Passivité et froideur avaient été le lot de son existence. Lointaine personnalité dont on ne connaissait, ni ne reconnaissait rien, si ce n'était cette éternelle absence. Obscurité à laquelle l'on ne voulait se mêler. Porter au nu par son droit d’aînesse, il n'était que le porteur de son nom pour voir en lui l'héritier le plus parfum, l'incarnation incarnat de son image à travers un temps déjà épuisé. Père et mère au comble de leur fierté ne pouvaient voir que cet enfant tant aimé n'était rien d'autre qu'un être tout fait de passivité. Incapable de prendre part dans les jeux de pouvoirs, il s'était depuis bien longtemps fait à l'idée d'en quitter les responsabilités, offrant par-là même une chance à son cadet de s'élever. Fortune malencontreuse que celui-ci ne sut rattraper, et que leurs géniteurs bien-intentionnés ne furent jamais capable d’appréhender.

Dès lors, comme un énième caprice d'un destin qu'il se refusait, on fit en sorte que les fils de sa destinée s'entremêlent à ceux d'une autre. Jeux des alliances et des fidélités. Il n'était là qu'un pion dont on s'assurait que jamais il ne fuirait. Sous les regards pleins de ces amitiés déguisés de son père, il ployait genoux pour mieux souffrir des errances de la fatalité. Bague au doigt, il devenait servile créature incapable de partir loin, et de ne plus s'impliquer. Formalité fort déplaisante au premier abord, il finit par s'habituer à cette présence au sein de ses quartiers, à cette présence qui toujours l'attendait, et il lui semblait enfin avoir une quelconque importance pour quelqu'un.

Étrange sensation que cet attachement auquel il ne s'attendait pas. De simple compagnie dérangeante, aux abords horripilants, il finit par s'y attacher avec une tendresse inespérée. Amour naissant et autres sensibilités auxquels il n'était pas habitué. Frayeurs étranges qui le prenaient au cœur et le laissant chancelant dès que ses pensées, les plus évasives, s'en allaient vers elle. Ses mains engourdies cherchaient alors la caresse de sa peau, et son souffle inspirait le parfum de sa chair. Il n'en disait pourtant mot, se faisait silencieux sur ces sentiments qui le dévoraient, restaient dans une réserve qui ne faisait qu'accentuer ses regrets. Incapable de dépasser sa propre passivité, de se montrer plus démonstratif qu'il ne l'était. Imperturbable, il se disait que cela suffirait pour le moment, qu'il n'avait de raison de s'inquiéter.

Le voile, pourtant, se fissura tandis que l'on déposait entre ses mains l'infernal révélation. Yeux écarquillés, cœur explosé, il n'était plus que fureur à l'idée de s'être ainsi trompée. Infidélité de l'être aimé, tendresse abîmée sur l'autel d'un adultère exposé. Il froissait le papier entre ses mains, le jetait avec rage, et ne savait qu'en penser. Peut être aurait-il préféré oublier, mais son orgueil ainsi touché l'en empêchait. [...]