libère ta lumière / mercy.

@mercy borgin
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Il est tard.
Tout le monde est parti.

Dans le pub, c’est silencieux. Après le chaos, après le bruit, ça bourdonne dans l’air. Et pourtant c’est la quiétude qui règne, alors que y’a juste les bruits furtifs de leurs pas pour troubler le silence. Les esprits un peu assagis, maintenant que les portes sont verrouillées et que la soirée est terminée. Jusqu’à demain, personne à s’occuper, et juste le pub à fermer. À deux, ça va vite. Et l’habitude rend les mouvements fluides, automatiques. La baguette qui s’agite pour nettoyer et pour ranger, et les mains qui terminent de régler les détails. Polar, il sait qu’il a la magie. La magie pour tout faire, et pourtant y’a rien qu’il aime plus que passer le chiffon sur son comptoir, après une longue soirée. Voir le bois regagner sa douceur normale, se débarrasser des taches et des restes. Remettre ça comme neuf, pour le lendemain. Il sait pas pourquoi, pour ce comptoir-là, il préfère le laver lui-même. La magie est là, pourtant. Mais c’est pas pareil. Alors il frotte. L’esprit un peu ailleurs, les pensées emmêlés. Le creux au fond de l’estomac. Lucy dans la tête.

Anniversaire funeste. Pas la mort, mais tout comme. Et il déglutit, parce qu’il n’a qu’elle dans la tête. Ses cheveux soyeux et son regard éclatant, la petite fossette au creux de ses lèvres. Lucy était toute sa vie. Et Lucy est partie. Faut vivre avec. Mais y’a des journées où c’est plus facile que d’autre. Et aujourd’hui, c’est particulièrement horrible. Aujourd’hui, ça fait mal, aujourd’hui, ça donne envie de se noyer un peu. Le whisky pur-feu pour remplir ses verres, toute la soirée. Pas trop, pour ne pas perdre pied, mais assez, pour alléger la lourdeur. Panser un peu la douleur, et s’oublier dans le verre. Plus personne à présent, alors il s’est resservi un verre, qu’il descend peu à peu. Relève les yeux, à un moment, pour regarder Mercy. Mercy qui s’occupe d’autre chose, son calme et son silence étrangement rassurants. Elle est belle, aussi, Mercy. Les cheveux bruns rassemblés sur sa tête. Des cheveux bruns, comme Lucy.

Il attire son attention, à Mercy. Lui lance un petit signe de tête. Le contact visuel qui suffit, pour que la communication se fasse. « J’crois qu’c’est bon. » Il acquiesce, désignant le reste du bar. « J’vais boucler. Tu peux y aller. » Rentre chez toi, Mercy. Lui, va rester là. Bien, là. Chez lui. Dans ce pub. Dans cet appartement.

Une autre gorgée pour Polar, la baguette rangée dans sa poche.
Bientôt ça sera le temps de rentrer.
Et d’essayer de ne pas tout faire flamber, juste pour oublier.

@polar machen
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Bruyante. La soirée avait été bruyante.

Le pub n'avait pas été plus rempli qu'à l'accoutumée, pourtant. Rien que des clients qui criaient plus fort que d'habitude. Qui avaient besoin de rire, et de laisser la pression de leur journée retomber dans une Bièreaubeurre ou un verre de Whisky Pur-Feu. Elle avait fini par en couper le petit appareil auditif qui lui permettait de mieux capter le bruit alentour. Retomber dans le silence, pour s'isoler. Pour se protéger. Ça ne l'avait pas empêché d'être efficace. Et ç'avait, contre toute attente, adoucit son humeur parfois un peu trop piquante. Réfugiée dans sa tête, et dans l'opaque mutisme du monde. Rien qu'un lointain murmure, qu'elle pouvait refuser de capter si son attention était parfaitement centrée sur ses propres pensées. Un exercice auquel elle s'était rompu avec les années — et qu'elle avait sciemment mis en pratique pour tout le reste de la soirée.

Si Polar l'avait remarqué, il ne lui avait pourtant rien dit. Savait, en outre, qu'elle n'était pas là pour répondre de lui. Seulement là pour aider. Le peu d'argent qu'elle empochait, à la fin du mois, était plus symbolique que dû — et elle tenait à ce que cela reste ainsi. Polar ne s'obstinait pas. Des tracas plus importants. Sujets de préoccupation qui, ce soir encore, l'avait tiré dans une humeur plus sombre et taciturne qu'à l'accoutumée.

Elle les avait remarquées, Mercy — ces petites gorgées d'alcool qu'il avait absorbées tout au long de la soirée. Elle se souvenait très bien de son état, à l'époque où il avait repris le bar en main. Quand Carter était mort, et que le legs à son ami avait semblé être une bonne option sur tous les fronts. Pour lui, comme pour Mercy. D'ordinaire, Polar faisait attention. Mais pas ce soir. Ce soir, quelque chose le travaillait. Et si Mercy avait refusé de se prononcer ou de l'interroger, elle avait bien remarqué son verre encore rempli. Entre ses doigts. Au bord de ses lèvres. C'est quoi, le plan ?

Boire pour oublier ?

Elle ne le regarde pas. Baguette levée dans les airs, ramenant d'un bref mouvement les chaises sur les tables du fond. Passant, d'un revers de main, le chiffon sur une autre. Puis elle le fourra dans la poche de son tablier. Terminant de faire remonter toutes les chaises sur les tables. Jusqu'à ce que, du coin de l'oeil, elle ne remarque le contact visuel qu'il essaie d'instaurer. Ses yeux qui se plantent dans les siens. Les lèvres de Polar qui s'articulent. « J’crois qu’c’est bon. » Elle ne prend pas la peine de remettre en place le sort. Ne fait que l'observer. Lire ses mots aux mouvements rapides de ses lèvres. Habituée. « J’vais boucler. Tu peux y aller. » Elle hocha la tête. Rangea sa baguette, en revenant vers le comptoir. « Je peux avoir un verre avant de partir, ou tu comptes garder la bouteille pour toi ? » Elle parle à un étrange volume. Bas, mais quelque peu irrégulier. Plus murmuré qu'autre chose — dans un simple désir de ne pas crier. Mais dans ces quelques mots, tout est dit. Je t'ai vu, toute la soirée. Je t'ai vu, à la fermeture.

Et j'te laisserai pas te murer dans un silence que tu n'as pas à endurer.

@mercy borgin
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Tu devrais arrêter, Polar.

La brûlure de l’alcool sur la langue, aussi amère que douce, qui berce ses pensées. Qui l’envoie à la dérive, sans trop l’éloigner du sable, Lucy dans la tête, Lucy dans la peau. Ces moments, ils sont toujours difficiles, à gérer et à laisser passer. Ça devient de plus en plus facile au fil des années, si c’est vraiment un mot qu’il peut utiliser, mais ça reste corrompu dans son coeur, la douleur de la défaite et le vide de l’absence. Ça fait des années maintenant, mais elle lui manque à tous les jours, dans un lit trop froid et dans une vie trop solitaire. Mais il ne veut de personne d’autre, Polar, pas vraiment, autant qu’il sait que c’est inutile de se raccrocher à un passé déjà effacé. Faut passer à autre chose, Polar. Mais à ce moment-ci de l’année, c’est toujours plus compliqué. Et l’alcool, tristement, c’est ce qu’il l’aide à tout faire passer.

Les quelques mots prononcés pour Mercy, la solitude qui va inévitablement le cueuillir, mais c’est sans doute mieux comme ça. Elle n’a pas à endurer son nuage noir, Mercy. Elle acquiesce, elle range sa baguette. Et il la regarde, sans trop comprendre pourquoi il a envie de la retenir. De lui dire, mais si tu veux rester, tu peux. Mercy, elle a pas à endurer ça. Mercy, elle devrait partir, profiter de la vie. Pas s’enfoncer dans la boue avec lui. « Je peux avoir un verre avant de partir, ou tu comptes garder la bouteille pour toi ? » Elle dit ça comme elle seule peut le faire, avec cette voix tellement douce et ferme à la fois, et Polar relève les yeux vers elle. Un peu surpris, mais au fond pas tant que ça. Des années qu’il la connaît, la belle Mercy, envoûtante Mercy, qui était au bras de son meilleur ami pendant si longtemps. Bien sûr qu’elle a remarqué qu’il s’est perdu dans ses verres toute la soirée, rien ne lui échappe à Mercy, surtout pas ce genre de comportement. Alors il sourit, Polar, et hausse légèrement les épaules. Sans un mot, il sort un verre propre, le dépose à côté du sien. Pas besoin de parler, avec Mercy, le silence est leur meilleur compagnon à tous les deux. « J’aurais préféré ne pas partager, mais bon… » Il hausse les épaules, mais c’est dit avec le petit éclat de malice dans le regard. Le sourire, pour lui montrer qu’il plaisantait. Le liquide ambrée remplit le verre, et il le fait glisser jusqu’à elle. « Désolé. » Il ne sait pas trop pourquoi il s’excuse, mais il le fait. Désolé d’avoir bu toute la soirée. Désolé de ne pas être de bonne compagnie. « C’est un moment compliqué de l’année. » Épaules haussées, suivi d’une gorgée. Tu le sais, Mercy. Tu le sais.

@polar machen
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Il ne se formalise jamais de ses mots, de sa voix. Ne s'étonne pas que ce soit parfois compliqué. Ne s'étonne pas de la voir ainsi hésiter dans le volume à donner. Des années à s'entraîner. Des années à perfectionner un art de s'exprimer dont le monde entier avait besoin pour la comprendre. Les signes ne suffisaient pas. Pas avec le commun des mortels. Et surtout pas dans le monde sorcier. Ça ne la dérangeait pas, Mercy. Elle préférait le silence, mais elle savait s'adapter. Et elle appréciait que Polar ne lui en demande pas trop. Qu'il accepte la quiétude de sa présence, et sache se satisfaire des regards et des quelques signes qu'elle lui donnait parfois.

Il sourit. Hausse les épaules. Lui sort un verre, alors qu'elle finit de franchir la distance qui les sépare. Appréciant qu'il ne la repousse pas. « J’aurais préféré ne pas partager, mais bon… » La voix basse de Polar n'est qu'à peine audible, mais les lèvres bougent avec suffisamment de clarté pour qu'elle puisse saisir les mots qu'il articulait. Et elle lui sourit, plus facilement qu'elle ne le penserait. C'est pas compliqué, avec Polar. Ça ne l'avait jamais été. Les vies avaient changé vite, pour lui comme pour elle. Et peut-être qu'au milieu de tout ça, ils se retrouvaient. Se comprenaient.

Il fait glisser le verre rempli jusqu'à elle, et elle hoche la tête pour le remercier. « Désolé. » Elle n'est pas certaine de ce que son oeil a capté. Relève le nez pour le fixer. Mais tout son corps crie les excuses. Attitude ployée dans cette douce culpabilité qui le dévorait. « C’est un moment compliqué de l’année. » Elle prend une gorgée de whisky. L'alcool qui lui brûle la gorge. Un tabouret qu'elle tire. Elle s'installe, abandonne son verre sur le comptoir. Retire son tablier, et le plie avec précaution. « Je me souviens, oui. » Et le regard qu'elle revient lui donner le dit. Sourire pour l'appuyer. « Lucy ? » Le nom qu'elle murmure. Gardant le contact visuel, pour être certaine de ne pas le perdre. Elle ne veut pas d'indiscrétion. Ne veut pas perdre la confiance, ni le ton de la confidence. Mais elle se souvient, Mercy. Elle se souvient de la douce Lucy. Les années partagées à Poudlard, puis la proximité de Carter et de Polar qui avait été suffisante à maintenir en vie ces souvenirs qu'elle avait de la jolie brune. Mais maintenant, tout avait changé. Carter n'était plus là. Lucy non plus. Et Mercy savait que le deuil de Polar était peut-être encore moins facile à gérer. « Est-ce que tu l'as déjà revue ? » Est-ce que tu sais ce qu'elle est devenue ? Ils ne s'en parlaient jamais. Les sujets tabous. Sujets de respect. Mais ce soir, Polar avait sorti la bouteille de whisky. Polar avait choisi un vieux péché, plutôt que de parler. Et sans se l'expliquer, Mercy refusait de le voir ainsi couler. À la mémoire de Carter, peut-être. Si elle pouvait le remplacer, ne serait-ce que pour une seconde, elle le ferait. Si elle pouvait devenir l'épaule sur laquelle se reposer. Faire de son mieux. Écouter, malgré son corps presque incapable d'une telle faculté. Pas besoin de bonnes oreilles pour ça. Rien que d'un coeur ouvert, et d'une attention mesurée.

Un peu de temps, et une sincère volonté d'aider.

@mercy borgin
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Elle sourit. Elle est belle quand elle le fait, Mercy. Pas si souvent que ça arrive. Mais y’a cette douceur et cette force dans sa manière de le faire, qui donne envie de lui rendre. Et pas juste par courtoisie. Un vrai sourire, comme on en voit peu dans le monde. Trop peur. Depuis le monde secoué par la guerre, les blessures difficiles à gérer. Compliquées à panser. Impossibles à oublier. Et Polar, lui, n’est qu’à peine cicatrisé par la guerre. Presque ressorti intact de sa cruauté, si ça n’avait pas été de Lucy. Elle qui l’a trop mal vécu, et qui n’a pu que s’en aller. À quelque part, il ne lui en veut pas. D’avoir voulu oublier. Mais la culpabilité est trop lourde pour Polar, qui à cette période de l’année ne peut que songer à ce qu’il aurait pu faire de mieux. Comment il aurait pu lire les signes. Qu’ils puissent continuer leur chemin côte à côte. Trop tard. T’as manqué ta chance. Et maintenant, Lucy, elle est partie.

Une gorgée de whisky, en même temps que Mercy. Elle s’est installée en face, et elle a les épaules détendues. « Je me souviens, oui. Lucy ? » Le nom vient faire trembler ses tripes, mais il est capable de rester calme. La tempête reste dans son regard, mais il n’essaie pas de la dissimuler. Sait très bien que Mercy peut tout y lire. Ils se connaissent suffisamment - et elle est assez douée pour ça. « Lucy. » Qu’il répète en acquiesçant légèrement. Le sourire calme aux lèvres, mais qui témoigne de la douleur, et de la brûlure dans son estomac. Le manque, le vide qu’elle a laissé derrière. Juste la solitude pour le bercer à présent. « Est-ce que tu l’as déjà revue ? » La question le surprend, pendant un instant. Et pourtant, c’est une excellente question à poser, à se demander. Il observe un instant le contenu de son verre, avant d’enfiler une autre gorgée. Plus grande que prévue, comme pour se donner le courage de répondre. « Je devrais dire non, n’est-ce pas ? Elle m’a demandé de ne pas la retrouver, après tout. » Il dépose son verre sur le comptoir, Polar. Quelques gouttes qui restent dans le fond du verre, mais pour l’instant il ne se resserre pas. Relève les yeux vers Mercy, pour y trouver un autre réconfort. Elle est d’une beauté fracassante. Le genre qu’on oublie pas - le genre qui reste. Intemporelle. « Mais j’avais trop besoin de savoir. Si elle allait bien. » Il hausse les épaules. Un soupir qui passe ses lèvres. « Alors ouais, je l’ai revue. New York. Elle a un chien, maintenant. » Drôle d’information à donner, mais c’est tout ce qui lui vient. Nouveau soupir, alors qu’il relève son verre pour finalement le terminer. « Ça devrait me rassurer, mais c’est pas ça qui fait mal. C’est le lit vide et froid, tous les matins. » Il regarde toujours Mercy. Sait qu’elle peut comprendre. Seule, elle aussi, après Carter.

Comment tu fais, toi, Mercy ?
Comment tu fais pour vivre avec ce vide ?

@polar machen
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Il a l'air surpris de la question. Un peu bouleversé, aussi. Comme s'il ne s'attendait pas à ce qu'elle lui lise le coeur et qu'elle lui demande ça. Et pourtant. Elle sait ce qu'elle a soulevé, Mercy. Elle sait la tentation qui a dû passer sous la peau de Polar, plus d'une fois. Retrouver Lucy. Retrouver sa douceur. Son visage. Profiter qu'elle ne se souvient pas. Qu'elle ne pourra pas le reconnaître, et l'accuser de l'avoir suivi. C'est si alléchant. Si tentant. Et la petite Borgin ignorait ce qu'elle aurait fait, à sa place. Sûrement aurait-elle cédé. Si Carter était encore vivant, quelque part — ou si quelqu'un avait fait battre son coeur comme Lucy celui de Polar. Qui était-elle, pour juger ?

Qui était-elle, pour essayer de comprendre ce qu'il ressentait ?

« Je devrais dire non, n’est-ce pas ? Elle m’a demandé de ne pas la retrouver, après tout. » Il a pris une gorgée d'alcool pour se donner du courage, et repose maintenant le verre sur le comptoir. Elle le fixe, Mercy. Installée sur un tabouret, son propre verre en main. À en laisser le fumet glisser dans ses narines. À respirer calmement, sans rompre ce contact visuel qu'elle avait toujours eu si important. Mais tu l'as fait. N'est-ce pas, Polar ? « Mais j’avais trop besoin de savoir. Si elle allait bien. » Il soupire. « Alors ouais, je l’ai revue. New York. Elle a un chien, maintenant. » Elle a presque envie d'en sourire, Mercy. Mais ses traits restent impassibles. Ouverts, mais tranquilles. Il termine son verre. « Ça devrait me rassurer, mais c’est pas ça qui fait mal. C’est le lit vide et froid, tous les matins. » Et elle comprend. Comprend sans comprendre — votre amour n'avait rien à voir avec mon confort. Prend une longue gorgée de Pur Feu, à son tour. Mais le froid et le vide, je connais ça.

Elle met un moment, avant de répondre. Les pensées en boucle, la situation trop calme pour qu'elle ne ressente le besoin de la briser sans avant y penser. « Sois pas trop dur envers toi-même. » qu'elle finit par articuler. Une inspiration longue — et elle finit son verre d'une rapide gorgée. Poursuit. « C'est normal, de vouloir t'assurer qu'elle va bien. » Si tu savais comment j'aimerais pouvoir faire la même chose avec mon père. Mon frère. « Tant que tu n'essaies pas de retrouver ta place dans sa vie, tu respectes sa décision. » Un sourire, doux, qui étire ses lèvres. « Mais évite de trop en faire. Ça pourrait vite devenir... Bizarre. » A little creepy, y'know. Elle attrape la bouteille. Se ressert, et la pose entre eux. Ne voulant nullement encourager Polar à se réfugier dans une boisson dont il n'avait que trop abusée, quelques années auparavant. « Y a rien qui réchauffera jamais tes draps comme elle le faisait. » Les réchauffer autrement, peut-être — mais personne ne sera jamais Lucy. Sur ça, il n'y avait pas à tergiverser. « Ça veut pas dire que rien ni personne ne sera jamais capable de t'offrir autre chose. » T'as pas à souffrir jusqu'à ce que mort s'en suive, Polar. La solitude ne te fera pas ça. Un jour, ça changera. « Elle n'arrêtera pas de te manquer. Mais tu vas apprendre à vivre avec. T'as déjà commencé. » C'est ça que le deuil fait. « Et c'est pas parce que t'as une brève rechute que tous tes efforts sont ruinés. » Elle ramène son verre à ses lèvres. Sourire disparu. Une gorgée. « Ça arrive même aux meilleurs. » On tombe. Genou au sol, et on respire. Un verre ou deux, et c'est reparti. « Mais la vie continue. » N'est-ce pas ?

@mercy borgin
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« Sois pas trop dur envers toi-même. » Il contemple son verre vide, Polar. Le verre transparent où il reste encore l’ombre d’une goutte d’alcool. La tentation de la laisser couler contre sa langue, au moins pour la savourer un peu. Mais ça semble un peu trop amer, à cet instant-là. Les mots de Mercy qui résonnent en lui. Toujours compliqué, pour lui, de ne pas culpabiliser. Il n’avait fait que ça depuis le départ de Lucy, il lui semblait bien. Se demander ce qu’il avait fait de mauvais, ce qu’il aurait pu faire de différent, en étant complètement aveugle au fait que Lucy avait pris sa propre décision. Certains jours, il parvenait à l’accepter. D’autres, un peu moins. « C’est normal, de vouloir t’assurer qu’elle va bien. » Il relève finalement les yeux vers Mercy, laisse son regard s’attarder sur ses yeux de crystal. Petit regard interrogateur, qui annonce le vraiment ? qui fait écho dans sa tête. « Tant que tu n’essaies pas de retrouver ta place dans sa vie, tu respectes sa décision. Mais évite de trop en faire. Ça pourrait devenir… Bizarre. » Le sourire de Mercy lui fait du bien. Le réchauffe étrangement bien mieux que n’importe quelle goutte d’alcool. Un peu de compagnie, ça change tout, il fallait le dire. « C’est pas peu dire. » Qu’il ajoute avec un petit sourire, lui aussi. Maladroit, comme geste, mais tout de même sincère. Elle a cette manière de dire les choses pour que ça compte, Mercy, et elle a dit juste les bons mots. C’est normal, Polar. Tu l’aimes toujours. C’est normal de vouloir savoir si elle va bien.

Elle attrape la bouteille et se ressert, sans faire de même pour lui. Et on dirait que ça le fait hésiter à remplir son verre à nouveau. Il a déjà bien bu ce soir, après tout. Faudrait pas exagérer non plus. « Y a rien qui réchauffera jamais tes draps comme elle le faisait. » Et ça lui tord l’estomac. Ce foutu lit vide, qu’il avait parfois envie de jeter par la fenêtre. L’odeur de Lucy sur l’oreiller, disparu depuis trop longtemps. « Ça veut pas dire que rien ni personne ne sera jamais capable de t’offrir autre chose. » Il sait qu’elle a raison, qu’il doit pas être défaitiste à ce sujet. Mais les quelques femmes qu’il avait touchées depuis le départ de Lucy n’avait été qu’un demi-réconfort. Un baume, sur une plaie trop vive. « Elle n’arrêtera pas de te manquer. Mais tu vas apprendre à vivre avec. T’as déjà commencé. Et c’est pas parce que t’as une brève rechute que tous tes efforts sont ruinés. » Il ne boit plus. Regarde simplement Mercy. Ses lèvres bouger alors qu’elle parle. Il sait qu’elle sait, qu’elle parle de sa propre expérience, un peu, à travers ses mots. Et ça le rassure, Polar, de savoir qu’elle lui raconte pas de conneries. Que ce n’est pas de la pitié, juste de la compassion. « Ça arrive même aux meilleurs. Mais la vie continue. »

Il lâche un soupir, en se redressant un peu. Main passée sur son visage, les doigts contre ses yeux brûlant de fatigue. « T’as raison. » Qu’il laisse finalement tomber, après quelques secondes de silence. « C’est juste… cette foutue culpabilité, tu sais. » Il se racle la gorge. Contemple la bouteille, sans avoir le courage de la soulever pour se resservir. Après tout, tu ferais peut-être mieux d’arrêter. « J’pensais qu’après autant de temps, ça aurait passé. Mais faut croire que non. Faut juste que j’accepte que je vais vivre avec le reste de ma vie. » Il regarde à nouveau Mercy, le petit sourire mélancolique sur les lèvres. « T’es de sage conseil, dis donc. J’devrais te raconter mes problèmes plus souvent. » Mais y’a une touche de complicité dans sa voix, qui indique qu’il l’agace juste un peu. « Et toi, alors ? » Il se laisse retomber contre le comptoir derrière, les yeux toujours posés sur elle. Pas gêné de regarder le contact visuel, pour Mercy qui faisait pareil. Rien à cacher, de toute façon. « Comment tu vas ? » Et ce n’est pas lancé à la légère pour garder la conversation en vie. Il est prêt à l’écouter, Polar. Tu peux verser tes tripes sur le comptoir, comme je l’ai fait, si tu as envie. Même si je sais que c’est pas trop ton genre, saches que tu peux le faire. « La boutique ? »